Les punaises de lit, un phénomène à prendre très au sérieux

Encore peu répandues en France il y a quelques années, les punaises de lit sont désormais présentes sur tout le territoire et dans tous les types de bâtis – des cinémas aux hôtels de luxe en passant par les logements sociaux. CDC Habitat s’est emparé du sujet et accompagne ses locataires infestés par le parasite.

On pense qu’elle est arrivée en France depuis les États-Unis ou le Canada. Le plus souvent, elle se transmet par contact humain ou par récupération d’objets, notamment de meubles d’occasion. La punaise de lit n’avait pas beaucoup fait parler d’elle en France avant 2017, mais peu à peu, les langues se délient. « Le sujet est apparu chez nous à l’été 2017 lorsque nous nous sommes rendus compte qu’une allée entière d’un de nos immeubles était infestée », explique Laetitia Balthazard, responsable du secteur Lyon-Nord chez CDC Habitat.

Il faut dire que le sujet n’est souvent évoqué qu’à demi-mot, avec une certaine gêne. Pourtant, contrairement aux idées reçues, la punaise de lit n’est pas liée à un type de logement ni à un souci de propreté ou de précarité : on la trouve aussi bien dans les trains, les hôtels et les salles de cinéma que dans les centres d’hébergement et les logements. Elle se nourrit de sang et est donc présente partout où les humains passent du temps.

« Pour bien gérer la punaise de lit, il faut d’abord poser un diagnostic précis de l’état d’infestation, pour pouvoir intervenir le plus efficacement possible », reprend Laetitia Balthazard. « Cela demande une certaine expertise et une méthodologie précise, c’est pourquoi nous nous sommes rapprochés de l’entreprise Polymissions, spécialisée dans le traitement bio des punaises et l’accompagnement des personnes touchées ».

Un traitement et un accompagnement

Il faut dire que l’impact psychologique du traitement en cas de présence de punaises de lit n’est pas à négliger. Selon le niveau d’infestation, il faut désinfecter le logement, laver l’ensemble des vêtements, voire se débarrasser complètement d’une partie du mobilier. « La présence de ce parasite peut créer une vraie détresse psychologique chez les gens les plus sensibles », précise Laetitia Balthazard. « C’est une procédure lourde que des personnes non-autonomes vont avoir du mal à gérer, d’où l’intervention commune de Polymissions et d’une conseillère en économie sociale et familiale (CESF) ».

En contact régulier toute l’année avec les publics les plus fragiles logés au sein du patrimoine de CDC Habitat, les CESF jouent en effet un rôle central dans le dispositif (voir interview plus bas), tout comme les gardiens ou les responsables de secteur. Les personnels de proximité sont en effet les plus à même d’identifier les signes avant-coureurs de la présence du parasite, et donc d’aborder le sujet avec les locataires. Une grande partie des équipes de terrain de la direction régionale Auvergne-Rhône-Alpes a d’ailleurs été formée sur le sujet par Polymissions, afin de mieux connaître la punaise de lit et adopter les bons réflexes en cas de suspicion ou de présence avérée.

Une sensibilisation progressive

Une fois le diagnostic posé, l’intervention menée dans le logement permet de se débarrasser rapidement du parasite. Un suivi sur une période de trois mois est également assuré afin d’éviter tout retour de l’infestation. « Sur le premier foyer identifié, nous avons traité 15 logements en profondeur : nous avons lavé leur linge, débarrassé une grande partie des meubles, remplacé la literie… », reprend la responsable du secteur. Polymissions a également permis aux locataires de retrouver un mobilier en bon état, et garanti sans punaise.

En revanche, si CDC Habitat prend en charge une grande partie de l’opération, un reste à charge est systématiquement facturé au locataire, afin de les sensibiliser et de les responsabiliser. « Pour l’instant, il n’existe pas de préventif, que du curatif pour les punaises de lit », conclut Laetitia Balathzard. « L’important, c’est que les locataires soient sensibilisés, sans créer d’effet de panique. Petit à petit, on voit que l’information circule et que les gens ont le réflexe de nous contacter à la moindre suspicion ».

La punaise de lit ajoute de la fragilité à des situations parfois déjà compliquées

Florence Ferrere, CESF à l’agence du Rhône de CDC Habitat Social

Quel est votre rôle en tant que conseillère en économie sociale et familiale ?

J’interviens à la demande des responsables de secteur de l’agglomération lyonnaise auprès des personnes identifiées comme fragiles. Je suis présente à chaque moment-clef, qu’il s’agisse de l’entrée dans les lieux, des premières démarches administratives… Pour beaucoup, il s’agit de leurs premiers pas en tant que locataires car ils décohabitent des parents, étaient hébergés par un tiers ou une organisation, ou étaient tout simplement sans domicile fixe : ils ont besoin, après le diagnostic posé, d’un soutien à un instant T afin d’entrer sereinement dans leur appartement, se l’approprier et trouver leurs marques. Au début, cela passe surtout par des rencontres régulières, au bureau ou à leur domicile, jusqu’à deux fois par mois si le ménage en ressent le besoin.

Quand avez-vous été confrontée la première fois aux punaises de lit ?

C’est en 2017 que l’on a commencé à en entendre vraiment parler, et depuis, le phénomène explose. C’est un vrai fléau car pour le traiter, il faut arriver à le diagnostiquer tôt. Nos locataires n’ont pas forcément connaissance du sujet et mettent du temps à nous en parler : derrière cela peut se cacher un sentiment de honte mais aussi la peur d’être stigmatisés par leurs voisins. Nous rencontrons aussi des personnes avec des fragilités diverses, par exemple des fragilités touchant la santé mentale. Il s’agit ici d’assurer une prise en charge spécifique et un peu plus soutenue pour nous assurer que le protocole et la désinfestation se passent dans les meilleures conditions.

A quel moment intervenez-vous ?

Dès que la présence de punaises de lit est avérée, le chargé de secteur et l’entreprise se mettent en relation avec moi. Nous échangeons sur les situations les plus fragiles et proposons une rencontre afin d’établir un processus d’accompagnement afin de gérer au mieux la phase de désinsectisation. Notre rôle est d’expliquer la situation et comment va se dérouler l’intervention, son coût, la prise en charge par des aides financières et la mise en place d’un échéancier si cela est nécessaire. Selon le niveau d’infestation, la préparation et les interventions sont plus ou moins lourdes : nous avons donc besoin que la personne soit rassurée, qu’elle adhère à ce qui lui est proposé afin de se sentir responsable, concernée et mobilisée.

Comment gérez-vous l’après ?

Après intervention, je reste en contact avec les locataires, pour savoir comment ils l’ont vécu et apporter un soutien psychologique car pour la plupart, avoir ces petites bêtes chez soi reste pour le moins très traumatisant. Je sollicite les partenaires afin d’obtenir des moyens de remplacer le mobilier détruit, je reste disponible et c’est ce qui les rassure en général. La formation assurée par Polymissions nous a d’ailleurs permis de mieux connaître le parasite, le protocole pour s’en débarrasser… Cela permet d’expliquer les choses simplement aux personnes que nous suivons.