Gérer au mieux les contentieux, entre accompagnement et prévention des expulsions

Gérer au mieux les contentieux, entre accompagnement et prévention des expulsions

Alors que tous les bailleurs sont confrontés à une hausse croissante des impayés, CDC Habitat en Île-de-France peut désormais s’appuyer sur un service entièrement dédié à l’accompagnement et la gestion des contentieux… mais pas seulement. Entretien avec Mireille Aubert, responsable contentieux, troubles locatifs & action sociale individuelle.

Votre service a été repensé il y a presque 3 ans : pouvez-vous nous en rappeler les fondamentaux ?


Nous avons réuni trois métiers en un seul service afin créer le pôle contentieux, troubles locatifs et action sociale individuelle. L’idée de cette association de compétences nous est apparue comme une évidence car au fond, tous les sujets que nous traitons sont intrinsèquement liés : derrière un problème d’impayé qui débouche sur un contentieux et un risque d’expulsion, il y a souvent des fragilités et des difficultés qui peuvent nécessiter l’intervention d’une conseillère sociale, qui va apporter un accompagnement sur-mesure. Dans nos résidences, ces situations personnelles difficiles peuvent se traduire par un certain nombre de nuisances de voisinage (sonores, olfactives …) mais aussi des problèmes plus graves d’occupation (suroccupation, insalubrité, de squats…) Nous cherchons donc à adapter notre niveau d’intervention selon les dossiers.

C’est un changement de fond de l’organisation de la direction interrégionale ?


A l’origine, les contentieux étaient gérés au niveau des agences de terrain. Celles-ci ont conservé la phase de pré-contentieux qui demande une proximité que seules les personnes qui sont au contact quotidien des clients peuvent avoir. Les 21 chargés de contentieux de mon équipe n’interviennent qu’à partir du moment où la décision est prise d’assigner en résiliation du bail. Mais ce qui a changé dans notre approche, c’est que lorsqu’une agence nous sollicite pour un dossier, nous sommes capables de nous mettre à 3 métiers autour de la table et de voir quelle est la réponse la plus adaptée à chaque situation. Cela peut aller du recouvrement classique à un accompagnement mixte avec un volet social, la prise en charge de sujets parfois lourds comme la santé mentale, les violences conjugales ou intrafamiliales, la perte d’autonomie des seniors… Nous essayons d’élargir notre vision pour personnaliser notre action, et ce toujours en lien avec la proximité et les agences.

Au quotidien, quels résultats observez-vous au bout de 3 ans ?

Nous avons eu une première phase d’harmonisation de nos pratiques et d’intégration des différentes cultures métiers qui a pris un peu de temps, mais tout est désormais fluide. Le fait d’avoir mis en place cette organisation permet également de soulager les équipes de terrain de situations complexes et sensibles, souvent source de fortes tensions. C’est d’autant plus appréciable que nous observons ces derniers temps une augmentation nette du nombre de dossiers à traiter et du nombre d’expulsions, avec une hausse de 25 à 30% juste sur la dernière année.

Comment expliquez-vous cela ?

Il y a d’abord une paupérisation accrue d’une partie de la population suite au Covid et aux conséquences des conflits internationaux, avec le retour de l’inflation et la hausse du coût des énergies. A cela s’ajoute un phénomène de plus en plus marqué de désociabilisation : les gens ne supportent plus leurs voisins, la moindre petite contrariété ou le moindre incident peut prendre des proportions énormes… Il y a une montée du niveau d’exigence et de l’intolérance qui vient parasiter les relations de voisinage mais aussi celles avec nos équipes, avec une hausse des incivilités et des agressions – le plus souvent verbales mais aussi parfois physiques. Et à côté de ça, on a aussi des réseaux mafieux qui se professionnalisent ces derniers temps, qui repèrent des logements vacants et génèrent de faux baux, de manière très organisée. Cela nous demande d’être toujours plus pointus et précis dans nos réponses.

C’est pour cette raison que votre service comporte 3 métiers dédiés aux problématiques de gestion de la clientèle ?

Tout à fait. Nous sommes 33 dans le service à être en soutien permanent des agences. Sur l’année 2023, nos équipes ont géré plus de 300 nouveaux dossiers de contentieux par mois, avec une moyenne de 60 demandes d’expulsions mensuelles auprès des préfectures et presque une quarantaine d’expulsions effectives. Sur un patrimoine de près de 150 000 logements au niveau francilien c’est peu, mais nous sommes actuellement à un niveau de 1,10% d’impayés, avec une hausse assez significative qui s’explique aussi par le fait que CDC Habitat est un des principaux bailleurs à livrer et mettre sur le marché des logements en quantité importante ces derniers mois. Cela crée un appel d’air et une difficulté à avoir des profils parfaitement adaptés aux logements et au niveau de loyer. Autant dire que nous n’avons pas fini d’être sollicités.

Le Pôle en résumé

  • 3 métiers : contentieux, troubles locatifs et action sociale individuelle
  • 33 collaborateurs
  • 21 chargés de contentieux
  • 300 actes de procédure par mois