CDC Habitat au chevet des copropriétés dégradées

CDC Habitat au chevet des copropriétés dégradées

Dans le prolongement du Plan Initiative copropriétés, CDC Habitat a créé une Direction de la Rénovation des Copropriétés Dégradées afin de travailler de manière prioritaire avec les collectivités à la requalification de ce patrimoine stratégique. Entretien avec Alexandre Lescaut, directrice adjointe, et Aurélien Souchet, directeur adjoint.

Dans quel contexte a été créée la Direction de la Rénovation des Copropriétés Dégradées de CDC Habitat ?

Alexandra Lescaut : La Direction a été créée en 2019 à la suite de la mise en place du Plan Initiative copropriétés lancé par le gouvernement et l’ANAH, l’Agence Nationale pour l’Habitat. Nous intervenons majoritairement à la demande des collectivités sur des copropriétés fragilisées par des problèmes financiers, techniques, sociaux ou de gouvernance. Pour ma part, je supervise les interventions sur les directions interrégionales Auvergne-Rhône-Alpes, Nord-Est, Grand-Ouest et Sud-Ouest…

Aurélien Souchet : …et moi sur l’Île-de-France et la Direction Provence-Alpes-Côte-D’azur et Corse. Chaque dossier est suivi par un chef de projet au niveau local, avec l’appui de la direction nationale, notamment sur les volets juridiques ou fonciers. Le relais est ensuite pris sur le terrain par les équipes de proximité. Cette organisation doit nous permettre de racheter 5 000 logements dans les prochaines années.

Quand considère-t-on une copropriété comme « dégradée » ?

AL : A partir du moment où l’on estime que les conditions de vie des habitants sont indignes voire dangereuses, on peut parler de copropriété dégradée. C’est souvent une accumulation d’indicateurs qui va amener la collectivité à réagir et à nous solliciter.

AS : Parmi les facteurs évidents, il y a un volet technique, avec un bâti souvent ancien, très fragilisé, nécessitant des travaux très importants. Il y a ensuite un environnement social complexe, notamment dans le cas de patrimoine situé en quartier prioritaire de la ville, avec des problématiques de précarité économique, auxquelles viennent parfois se greffer des questions de sécurité ou de trafics… En France, on estime actuellement à plus de 110 000 le nombre de logements dans cette situation.

Dans quels cas et de quelle manière intervenez-vous ?

AL : Le pré-requis pour que nous puissions intervenir est que la copropriété soit dans un dispositif public de type plan de sauvegarde ou OPAH (opération programmée d’amélioration de l’habitat) qui nous permettra de bénéficier des subventions de l’ANAH ou de l’ANRU. Ces interventions étant forcément déficitaires, c’est un point essentiel pour garantir l’équilibre des opérations.

AS : Dans les grandes lignes, il y a deux interventions possibles. Soit la copropriété peut être redressée, dans ce cas nous rachetons quelques logements, les réhabilitons, les mettons en location, puis les revendons. Nous travaillons ensuite avec les autres copropriétaires à l’assainissement des finances, la rénovation des parties communes ou des espaces extérieurs… L’autre cas, c’est celui où la situation est trop dégradée.
Il convient alors d’acheter l’ensemble des logements afin de les démolir ou de les revendre à un bailleur social. C’est parfois le cas dans le cadre de certains projets ANRU notamment.

Ce sont des opérations lourdes, qui mobilisent beaucoup d’acteurs et demandent un cadre contractuel précis. Est-ce compatible avec des situations d’urgence absolue ?

AL : Il est vrai que ces projets nécessitent un cadre précis. Dans le cas du recyclage de copropriétés, nous passons par une concession d’aménagement. S’il s’agit de redresser une copropriété, il faut une concession de services et de travaux. Dans les deux cas, cela nécessite le lancement d’un appel d’offres et une mise en concurrence. Si besoin, nous pouvons tout de même intervenir en amont via une « convention d’urgence » mise en place entre la collectivité et CDC Habitat Social, et nous porter acquéreur de quelques logements le temps de la mise en place des concessions.

AS : Il y a aujourd’hui en France beaucoup de copropriétés dans un état catastrophique, et des situations qui ne peuvent pas attendre. Pour ces cas-là, nous avons créé une société de portage immobilier, CDC Habitat Action Copropriétés, qui a vocation à acheter 5 000 logements sur toute la France. L’action foncière dans les copropriétés était jusqu’ici le chaînon manquant de l’intervention publique.

Comment gérer les effets collatéraux et les tensions inhérentes à ce genre d’interventions ?

AL : Ce sont des projets qui demandent beaucoup de temps et de présence humaine.
Il faut travailler en amont avec les collectivités pour monter les dossiers, cibler les propriétaires, discuter avec eux, rencontrer les syndicats de copropriété… Il faut être capable d’accompagner des gens parfois démunis ou dépassés par la situation. C’est pour cela qu’il faut une stratégie et un projet urbain complet pour chaque opération : mettre en place une action de portage est un plus, mais si une réflexion globale et sur le
long-terme est nécessaire.

AS : Pour aider de façon pérenne une copropriété dégradée, il faut compter entre 10 et 15 ans. Au-delà du pilotage et de l’action foncière, nous nous engageons dans les instances de la copropriété afin de créer une émulation positive. Et nous nous appuyons au quotidien sur les différentes directions du groupe CDC Habitat, notamment nos agences de gestion. Tous les métiers doivent être mobilisés dans la durée.

Copropriété Vaulx en Velin
Copropriété située à Vaulx en Venin (69) dans laquelle CDC Habitat Auvergne – Rhône-Alpes s’est porté acquéreur d’un premier logement

A Vaulx-en-Velin, une réflexion qui démarre

C’est sur un territoire jugé prioritaire par l’État dans le cadre du Plan Initiative Copropriétés, à savoir le quartier Sauveteurs-Cervelières situé sur la commune de Vaulx-en-Velin, que la Direction régionale de CDC Habitat Auvergne-Rhône-Alpes envisage actuellement sa première intervention sur une copropriété dégradée. Comme l’explique Lucile Barou, Directrice Adjointe, « on recense 9 copropriétés en difficulté sur le quartier, dont 2 en situation d’urgence. La Ville réfléchit à mettre en place une opération programmée d’amélioration de l’habitat et nous a contacté pour voir de quelle manière nous pouvions intervenir via un mécanisme de portage ». Cet échange doit permettre de faire un diagnostic complet de la situation, afin de déterminer quels seraient les finalités et modalités d’une intervention en portage.

Une occasion s’étant présentée, CDC Habitat s’est porté acquéreur d’un premier logement dans une des copropriétés, « une situation pas forcément confortable car nous aurions préféré intervenir dans un cadre contractuel plus clair. Mais cela évite que le logement soit repris par un marchand de sommeil ou un acquéreur qui serait à son tour en difficulté dans quelques temps ». Si des travaux d’urgence sont prévus sur le quartier, les discussions avec la Métropole de Lyon et la Ville de Vaulx-en-Velin pourraient déboucher sur la mise en place d’une convention de portage dans l’objectif de définir un schéma complet de redressement et de recyclage dans les prochains mois.