Quelles solutions pour densifier le patrimoine ?

A l’heure du ZAN, pour continuer de répondre aux tensions croissantes du marché, de plus en plus de territoires misent sur la densification. Des opérations au carrefour de multiples problématiques et pour lesquelles Grand Paris Habitat a développé une véritable expertise – illustrée par plusieurs projets actuellement en cours.

Où construire quand le foncier se fait rare mais la demande de logement toujours plus pressante ? Si en Île-de-France, les collectivités sont habituées à composer avec ces tensions, certaines n’hésitent plus à y répondre en densifiant leur patrimoine. Pour Christophe Chanu, directeur interrégional adjoint de CDC Habitat Île-de-France en charge du patrimoine et directeur de la maîtrise d’ouvrage au sein du GIE Grand Paris Habitat, « la densification ne procède pas que d’une démarche systémique mais surtout par opportunité. Le problème principal pour les collectivités est que rajouter un bâtiment quelque part, ou des logements en surélévation sur un immeuble existant, cela a non seulement un coût mais aussi des répercussions sur le plan urbain et social ».

Pour autant, si les freins sont nombreux, ils peuvent être levés avec la bonne réflexion et la bonne méthodologie. Grand Paris Habitat travaille d’ailleurs sur plusieurs projets qui illustrent toute la diversité des opérations de densification possibles en zone tendue. Petit tour d’horizon.

Densifier sur des espaces libres : la solution la plus évidente ?

Sur le papier, c’est le projet le plus simple : un foncier disponible, un projet, des logements supplémentaires pour renforcer l’offre locale. Pour autant, dans la réalité, rares sont les projets à voir le jour. « La première limite est que les collectivités qui ont des besoins ont finalement assez peu d’espaces disponibles », souligne Christophe Chanu. « Ensuite, en milieu urbain, le projet risque souvent d’empiéter sur un espace vert ou un lieu de vie collective comme un parc, ce qui crée forcément des tensions avec les habitants et freine donc les collectivités ».

« La clef de la réussite est d’avoir un foncier disponible et d’apporter des contreparties aux riverains pour que l’opération s’intègre bien dans l’environnement existant », confirme Marc Escargueil, directeur de programme chez Grand Paris Habitat. C’est le cas pour plusieurs projets menés à Athis-Mons (91), à Rosny-sous-Bois (93), ou plus récemment à Ozoir-la-Ferrière (77) où Grand Paris Habitat lance un programme de 62 nouveaux logements dans une résidence en comprenant déjà 639. « Nous avons mis en place un projet plus large de résidentialisation avec amélioration de la voirie, des circulations et des espaces verts, redécoupage des emprises de chaque immeuble, et création d’aires de jeux pour les enfants ».

A Paris intra-muros, où le foncier est encore plus rare et plus cher, Grand Paris Habitat a également lancé en 2021 une opération de densification complexe en restructurant un parking enterré, avenue Gambetta dans le 20e arrondissement de Paris. 52 logements – 13 sociaux et 39 intermédiaires – pourront ainsi être créés grâce à la reprise en sous-œuvre du site.

Surélévation : une solution originale mais coûteuse

Quand il n’y a pas de surface au sol, c’est vers le haut que le regard se porte. La surélévation est en effet une technique de densification possible, mais du fait de son coût, elle est plus souvent réservée aux zones très tendues où elle pourra être rentabilisée. « Les contraintes amont sont multiples », précise Marc Escargueil. « Le PLU permet-il de construire des logements supplémentaires ? Le bâtiment est-il capable de soutenir plusieurs logements, même réalisés avec une structure légère en bois ? Où implanter les ascenseurs ou la VMC ? Les nouvelles normes d’accessibilité pourront-elles être renforcées ? Tout cela demande d’importantes mises au point techniques en amont ».

Autre point à prendre en compte : les nuisances pour les habitants des immeubles concernés pour une finalité qui ne les concerne pas toujours. C’est pour cette raison que Grand Paris Habitat a choisi de conjuguer une opération de surélévation avec un programme complet de réhabilitation à Belleville, dans le 19e arrondissement de Paris. « Nous construisons 11 logements sociaux et 33 logements intermédiaires en surélevant un ensemble immobilier de 363 logements, de 1 à 4 étages supplémentaires aux immeubles existants », reprend le directeur de programme. « Les immeubles sont assez récents et ont des ascenseurs que l’on va pouvoir prolonger pour desservir les nouveaux étages ».

Si les travaux seront assez lourds et donc les nuisances conséquentes pour les locataires, ceux-ci bénéficieront d’une amélioration significative de leur environnement, puisque Grand Paris Habitat a non seulement prévu de reprendre l’enveloppe thermique du bâtiment pour en améliorer la performance mais aussi de rénover l’ensemble des parties communes et certaines zones des logements – notamment les pièces humides.

Requalification urbaine : la voie privilégiée

La manière la plus simple de densifier le patrimoine reste évidemment d’intégrer cette programmation supplémentaire dans un projet de requalification urbaine. En repensant les espaces et les circulations avec un regard neuf, et le recul de plusieurs décennies d’aménagement urbain, il est en effet possible de renforcer l’offre de logement tout en repensant un quartier ou un centre-ville, en apportant notamment de la mixité, des commerces et des services.

« Quand on démolit et que l’on restructure, la densification prend tout son sens et il est plus facile de la faire accepter par les habitants qui profitent d’une véritable amélioration de leurs conditions de vie », précise Christophe Chanu. « De nombreux projets menés dans le cadre de l’ANRU, notamment les NPNRU, permettent d’avoir cette approche globale, mais il est également possible d’intervenir en dehors de l’ANRU ».

C’est le cas à Vernouillet (78) où CDC Habitat accompagne la communauté d’agglomération dans la requalification de plusieurs parcelles dont elle est propriétaire. Le projet qui vise à repenser complètement le cœur de ville devrait notamment permettre de créer 180 logements supplémentaires (sociaux, intermédiaires, abordables, en accession…) grâce à une modification du PLU.

« Nous allons réhabiliter ou démolir tout ce qui est vétuste ou mal situé, repenser les circulations et les espaces, déplacer la galerie commerciale pour créer de nouvelles dynamiques », conclut Marc Escargueil. « C’est une opération de longue durée, qui pourrait s’étaler sur une décennie, et qui va mélanger construction, réhabilitation, résidentialisation et même viabilisation d’une parcelle vendue à un promoteur ».