Réhabilitation : un projet pensé pour le réemploi des matières premières

Réhabilitation : un projet pensé pour le réemploi des matières premières

L’opération de rénovation de la résidence Les Bons Raisins à Rueil-Malmaison (92) a été l’occasion pour CDC Habitat d’expérimenter le réemploi de matières premières à grande échelle – grâce à un procédé original de dépose-repose des pierres de la façade sur une nouvelle ossature. Retour sur le projet.

Si le réemploi ou le recyclage de matières premières n’est pas encore systématique sur les chantiers de réhabilitation, CDC Habitat réfléchit de plus en plus à des manières de conserver ou réutiliser un certain nombre d’éléments des sites rénovés – notamment les matériaux les plus nobles. C’est le cas à Rueil-Malmaison, dans le cadre de l’opération d’acquisition-amélioration de la résidence Les Bons Raisins : sur ce site de 105 logements, situé dans le périmètre de la ZAC de l’Arsenal, au milieu du futur écoquartier, l’équipe a en effet identifié la présence de matériaux qu’il aurait été dommage de ne pas conserver.

Thierry Brocheriou, directeur de programmes adjoint à Grand Paris Habitat

Comme l’explique Thierry Brocheriou, directeur de programmes adjoint à Grand Paris Habitat, « dès les premiers diagnostics avant travaux, nous avons constaté que la façade actuelle, réhabilitée dans les années 90, était particulièrement qualitative de par la présence de pierres sur environ 70% de sa surface. Lors de l’appel à candidature de maîtrise d’œuvre, nous avons donc indiqué aux candidats que nous souhaitions que ces pierres soient conservées d’une manière ou d’une autre dans le nouveau projet ». Cette indication a fortement inspiré les candidats, dont le groupe Arcanes Architectes qui l’a intégré à son parti pris architectural, dans une démarche de dépose-repose des pierres sur une nouvelle ossature par-dessus une isolation.

Une approche à la fois technique et esthétique

Si le réemploi de ces matériaux était souhaité, il fallait en effet lui trouver un usage adapté au projet de réhabilitation dont le premier enjeu était d’atteindre le niveau d’exigence thermique BBC Rénovation. Outre une classique remise à neuf des pièces humides des logements et des parties communes, l’enveloppe du bâti a été refaite afin d’atteindre la performance thermique nécessaire, et c’est dans cette phase qu’ont été intégrés les matériaux. « Les pierres et leur vêture isolante ont été déposées, nettoyées puis remises en place sur rail par-dessus 100 mm de laine de roche », souligne Raphaël Bénant, responsable de programmes chez Grand Paris Habitat. « Au total, 90% de la vêture a pu être réemployée, soit environ 70 tonnes de pierre. Quant aux pierres non utilisées, elles ont pu être stockées sur site en vue d’une éventuelle future rénovation ».

Si la résidence bénéficie bien d’une isolation optimale, elle a surtout conservé le cachet architectural de la précédente réhabilitation, avec un pourcentage élevé de matériau noble en façade – chose rare sur les ensembles immobiliers à quadruple façade. En déposant, triant, mélangeant et redistribuant les pierres des différentes faces bâties, CDC Habitat a pu apporter une diversité de tonalités offrant une vraie nouvelle qualité graphique.

Une démarche reproductible

Sur le plan financier, ce type d’intervention aura certes demandé un investissement légèrement supérieur à une isolation thermique classique par l’extérieur mais va apporter une vraie pérennité dans le temps au bâtiment grâce à la qualité intrinsèque du matériau, très résistant, qui permet d’envisager un retour sur investissement sur le moyen terme. Par ailleurs, l’empreinte carbone de la rénovation a fortement été réduite du fait de ce réemploi.

Mais surtout, le projet aura permis à CDC Habitat de poser les bases d’un nouveau mode d’intervention reproductible, en s’appuyant notamment sur l’expertise de l’entreprise GTM, assistée de SOCOTEC, qui dispose d’une capacité rare à garantir des process de mise en œuvre de matériaux n’étant plus sous avis technique – comme c’était le cas à Rueil-Malmaison.

« Ce type de pierre ayant été largement utilisée en France dans les années 90, nous devrions pouvoir reconduire la démarche sur d’autres projets – même si le réemploi de matériaux fait appel à des manières de travailler qui obligent tous les acteurs impliqués à sortir des process habituels », conclut Thierry Brocheriou. « Un tel chantier, qui n’est ni un gain de temps ni une économie budgétaire, ne se réalise qu’avec une conviction partagée »