Chaînon manquant entre le logement social et le logement libre, le logement intermédiaire est de plus en plus plébiscité par les collectivités de toutes tailles qui y voient un vrai levier de fluidification des parcours résidentiels. Retour sur le déploiement progressif du dispositif en Auvergne-Rhône-Alpes.

Comment parvenir à se loger décemment quand on n’est pas prioritaire pour un logement social mais que les loyers du parc privé sont trop élevés ? C’est à ce dilemme rencontré par de plus en plus de ménages français, notamment des jeunes en début d’autonomie, que le logement intermédiaire vient répondre. Celui-ci propose, en effet, une offre de qualité, avec un loyer inférieur au marché, de l’ordre de 10 à 15 % en moyenne mais parfois plus selon les territoires.

Comme l’explique Anne Canova, directrice régionale Auvergne-Rhône-Alpes de CDC Habitat, « le logement social souffre parfois d’une image trompeuse et d’une communication insuffisante qui font que de nombreuses personnes pensent en être exclues et ne déposent même pas de demande. Parallèlement, la hausse des loyers dans le parc privé crée une vraie tension sur le marché et ne permet pas à ces mêmes ménages de se loger, ou difficilement. Le logement intermédiaire vient répondre à cet entre-deux extrêmement pénalisant ».

Des bénéficies pour les locataires comme les collectivités

Conscient de ce besoin grandissant, le groupe CDC Habitat a rapidement fait le choix de développer le logement intermédiaire au niveau national, avec de fortes déclinaisons locales. Ainsi, le dispositif représente aujourd’hui un quart du patrimoine de CDC Habitat en Auvergne-Rhône-Alpes, mais aussi près de deux tiers de la production actuelle de logements neufs : « Au début, le logement intermédiaire était surtout plébiscité par les grosses agglomérations qui ont vu les loyers du marché libre exploser au fil des années », reprend Anne Canova. « Mais au fil du temps, de plus en plus de projets incluant le dispositif ont émergé, dans de plus petites communes, parfois même dans des quartiers prioritaires de la ville ».

Il faut dire qu’en garantissant un loyer inférieur au prix du marché, le logement intermédiaire est accessible à près de 85 % de la population française. Bien intégré dans les politiques locales de l’habitat, il est à la fois un gage de mixité sociale et de fluidité du parcours résidentiel – en plus d’être un tremplin vers un logement autonome pour de nombreux jeunes âgés de 25 à 35 ans, seuls ou en couple, parfois même avec un enfant.

Le logement intermédiaire cible également les travailleurs clés, avec des partenariats mis en place avec les collectivités, les services hospitaliers et les entreprises pour organiser une priorité en faveur de leurs personnels, avec un accès privilégié à une plateforme de commercialisation. Certains logements aussi peuvent être réservés à la fonction publique.

« Nous avons passé des conventions avec la Métropole de Lyon et le Pays de Gex afin de développer encore plus ce produit qui permet aussi de concurrencer indirectement les effets parfois néfastes de l’investissement individuel PINEL », souligne Anne Canova. La présence d’un bailleur social comme CDC Habitat dans les copropriétés est en effet un gage de stabilité et d’implication. Les bailleurs étant en outre soumis à une revente échelonnée sur 20 ans, cela permet de limiter les effets de revente massif de copropriétaires une fois le dispositif fiscal arrivé à son terme. Enfin, le logement intermédiaire étant commercialisé via les canaux classiques (agences, sites Internet…), il permet de toucher un plus grand nombre de locataires potentiels, notamment ceux qui ne pensent pas à se tourner vers le logement social alors qu’ils pourraient y avoir droit.

Des réussites locales qui donnent le ton

Avec un objectif annuel de 800 nouveaux logements intermédiaires construits par an, CDC Habitat entend accompagner activement les collectivités dans l’intégration toujours plus poussée du logement intermédiaire dans les politiques locales de l’habitat – que ce soit à travers des projets mixtes ou 100 % intermédiaires. Preuve de son succès, le dispositif occupe d’ailleurs une place centrale dans le plan de relance du Groupe, et de nombreux projets sont actuellement en cours de développement dans les grandes agglomérations (Lyon (69), Annemasse (74), Grenoble (38), Clermont-Ferrand (63), etc.) comme dans les territoires moins tendus ou labellisés Action Cœur de Ville (Villefranche-sur-Saône (69), Bourgoin-Jallieu (38), Vienne (38), Bourg-en-Bresse (01), etc.).

« Face à la tendance haussière des loyers, le logement intermédiaire s’est progressivement imposé comme une solution pour de nombreux ménages », conclut Anne Canova. « Notre expertise en la matière fait de nous un interlocuteur privilégié des collectivités qui souhaitent renforcer la mixité et la solidarité de leurs politiques de logement ».

Quelques exemples de programmes en Auvergne-Rhône-Alpes

Gex – Castel Park
Cette résidence propose une offre mixte sur les hauteurs de la ville, avec une partie en accession à la propriété, des logements sociaux et une vingtaine de logements intermédiaires gérés par CDC Habitat.
Annemasse – Résidence Hermès
Livrée en juin 2020, cette résidence mixte de standing propose à la fois un bâtiment en accession à la propriété, des logements sociaux et 70 logements intermédiaires.
Lyon 2 – Tour Belvy
Un programme de 85 logements au total ( dont 40 logements intermédiaires repartis entre le 1er et le 9e étage), situé dans un quartier prisé du centre ville de Lyon, avec services partagés, destinés aux résidents et gérés par le syndicat de copropriété

Le groupe CDC Habitat publie en cette rentrée un guide sur la précarité énergétique afin de faire le tour de cette problématique complexe qui touche près d’un ménage sur cinq en France et contre laquelle le Groupe est pleinement mobilisé. Entretien avec Élodie Espéout, responsable de la stratégie environnementale, et Sandra Beer, responsable études et analyse de marché.

Depuis quand CDC Habitat s’est-il emparé de la question de la précarité énergétique ?

Élodie Espéout : Le Groupe a publié dès 2008 un livre vert sur la transition énergétique et écologique, « L’Habitat au défi de la résilience ». À cette époque, nous affichions déjà notre volonté de réduire drastiquement nos émissions de gaz à effets de serre. Puis en 2010, le Grenelle de l’Environnement a permis de poser la définition de la précarité énergétique, poussant les bailleurs à se saisir de cette question qui dépasse le seul cadre de leur patrimoine.

Sandra Beer : Il faut dire que le phénomène touche aujourd’hui près de trois millions de ménages, soit environ sept millions de personnes. L’une des difficultés est la façon d’aborder la question selon que l’on se situe dans le nord ou dans le sud de la France, selon que l’on parle de barres d’immeubles des années 70 ou de maisons individuelles, ou selon qu’il s’agisse d’accompagner des personnes âgées ou des familles nombreuses.

Quand on parle de précarité énergétique, la première image qui vient est celle des « passoires thermiques ». Pourtant, votre travail souligne que ce n’est qu’une partie du problème…

EE : Il y a bien sûr un facteur « bâti » important dans la lutte contre la précarité énergétique. D’ailleurs CDC Habitat s’est engagé à ne plus avoir aucun logement avec une étiquette F ou G à l’horizon 2025, et mène une importante politique de réhabilitation basée sur les diagnostics de perfomance énergétique (DPE). Mais pour être vraiment efficace dans la lutte contre la précarité énergétique, notre stratégie se doit d’intégrer les caractéristiques d’occupation du parc.

SB : En discutant avec les équipes des agences de proximité, nous nous sommes en effet rendu compte que dans beaucoup de cas, le bâtiment et les équipements n’étaient pas la seule cause. Par exemple, il ne suffit pas d’installer de nouveaux systèmes de chauffage pour enrayer le phénomène.

La prise en compte des usages au sein du logement est nécessaire car ceux-ci impactent de façon non négligeable les consommations d’énergie. L’adhésion des locataires aux actions menées apparaît ainsi comme le facteur déterminant du projet.

Il y a donc un gros travail de sensibilisation des publics à mener ?

SB : Il faut évidemment sensibiliser nos locataires après chaque opération de réhabilitation, mais il faut aussi faire de la prévention. Nous avons développé une méthodologie pour identifier la fragilité de notre patrimoine, et croiser cette réalité avec le profil des ménages pour intervenir le plus tôt possible.

C’est essentiel car la précarité énergétique est au croisement d’autres problématiques : quand on n’est pas bien chez soi, on n’invite pas les gens à venir, on s’isole… Une mauvaise qualité de l’air intérieur peut aussi avoir des conséquences directes sur la santé.

EE : En tant que gestionnaire, il y a aussi un impact potentiel en matière de dégradation et de sécurité du bâti. D’où l’importance de ce travail d’identification du patrimoine prioritaire et des locataires en situation de fragilité. Identifier la fragilité, c’est se donner les moyens d’éviter que les gens ne basculent dans la précarité.

Comment créer des dynamiques locales autour de ce sujet ?

SB : Il y a une vraie prise de conscience autour de ce sujet depuis quelques années. Certaines collectivités sont d’ailleurs précurseurs en la matière, et ont déjà déployé des dispositifs comme le service local d’intervention pour la maîtrise de l’énergie (SLIME) avec le réseau pour la transition énergétique CLER. Nos équipes s’associent régulièrement à ces actions et travaillent main dans la main avec des associations locales. Sur ce sujet comme sur d’autres, les dynamiques territoriales sont essentielles, sinon ça ne fonctionne pas.

EE : Souvent, avant même de parler d’énergie avec les locataires, il y a d’autres sujets à aborder, comme les questions d’emploi, d’habitudes, de gestion des déchets, etc. Cela passe par un accompagnement de proximité, et des actions collectives qui évitent que les gens ne se sentent stigmatisés alors même que l’on vient les aider.

Il y a une vraie psychologie à avoir autour de la précarité énergétique. C’est d’ailleurs pour ça que CDC Habitat a prévu de former l’ensemble de ses équipes de proximité à cette problématique. 150 gardiens ont déjà été formés, et nous sommes en train d’adapter les sessions aux nouveaux protocoles sanitaires pour poursuivre ce travail.

« Le traitement de la précarité énergétique constitue un des enjeux majeurs pour négocier le virage de la transition écologique. C’est en conciliant l’ensemble des interventions dans une démarche inclusive et participative de toutes les parties prenantes que nous réussirons à faire de l’habitat, des lieux de vie responsable, durable et solidaire »

Samira Chacal, responsable de la coordination du développement social et urbain (DSU) chez CDC Habitat

Un projet pilote au cœur de Lyon (69)

L’Agence du Rhône de CDC Habitat lancera, cet hiver, une première expérimentation afin de mieux cerner les différents leviers pour lutter efficacement contre la précarité énergétique sur le terrain. « Nous travaillons en concertation depuis 2019 avec les équipes du siège pour construire une stratégie adaptée à la fois à notre patrimoine et à nos locataires », explique Anne-Sophie Mouillé, directrice de l’agence.

Une liste de plusieurs ensembles immobiliers « prioritaires » a ainsi été constituée, et un immeuble de neuf logements locatifs situé rue Montesquieu dans le 7ème arrondissement de Lyon a été choisi pour un test grandeur réel, portant à la fois sur le remplacement des chaudières et sur un accompagnement des locataires mené avec l’association Cléo.

« L’idée est de profiter de la période de chauffe allant d’octobre à mars pour analyser les comportements et les consommations des locataires, et travailler au cas par cas avec l’association pour expliquer à chaque ménage comment optimiser les réglages, pour parler aussi éco-gestes durables… ».

Le choix s’est porté sur un bâtiment accueillant plusieurs personnes sans activité professionnelle (retraités, personnes en recherche d’emploi ou invalides), parfois isolées ou en situation de sous-occupation du logement – des problématiques régulièrement croisées dans le patrimoine de CDC Habitat et qui peuvent avoir un impact direct sur la précarité énergétique.

« À la fin de l’hiver, nous évaluerons l’impact financier du changement des chaudières et des comportements sur les charges des locataires », conclut Anne-Sophie Mouillé. « Cela viendra alimenter notre réflexion sur la meilleure manière d’aborder cette question majeure avec nos publics les plus précaires. Nous voulons trouver la méthodologie adaptée à notre patrimoine et au fonctionnement de nos agences de terrain ».

Grand Paris Habitat, le GIE francilien du groupe CDC Habitat, dédié au développement, à la maîtrise d’ouvrage et à la rénovation urbaine, a choisi de se mobiliser en faveur de l’émergence d’une filière bois francilienne forte en rejoignant Francîlbois l’interprofession Forêt-Bois d’Île-de-France. Grand Paris Habitat souhaite partager cette démarche avec l’ensemble de ses 13 bailleurs adhérents dans le cadre de « GPH Académie », en vue de lancer une vingtaine de projets bois dans les prochaines années.

C’est l’un des matériaux les plus nobles et les plus anciens. C’est aussi l’un des plus performants sur les plans environnemental, technique et sanitaire.

Depuis quelques années, le bois fait un retour en force dans le domaine de la construction, soutenu par des architectes, des promoteurs et surtout les bailleurs sociaux qui ont été parmi les premiers à lancer des projets ambitieux en la matière. Comme l’explique Alexandra Rossi, directrice de l’ingénierie territoriale et des partenariats chez Grand Paris Habitat, « nous souhaitons nous engager dans une démarche de développement et de construction durables.

A l’échelle du groupe CDC Habitat, nous avons déjà mené plusieurs projets en bois qui nous ont permis de vérifier sur le terrain la pertinence de ce matériau, notamment en matière de maîtrise des coûts en phase de construction, comme de maintenance ».

Un projet exemplaire

C’est à Montreuil (93) que le 1er projet « tout bois » réalisé par Grand Paris Habitat pour le compte de CDC Habitat social a vu le jour en 2016. Labellisée Passivhaus, la résidence Girard est un des plus hauts immeubles à ossature bois d’Europe (R+6) et un véritable modèle de sobriété, notamment énergétique, puisque l’isolation et les équipements mis en place permettent de chauffer l’ensemble des 17 logements sociaux avec une simple chaudière de maison individuelle.

« Ce projet nous a permis de prouver qu’en favorisant les matériaux biosourcés, on peut atteindre des performances excellentes – même sans recourir aux énergies renouvelables », souligne Jacques Drieu La Rochelle, directeur de programmes chez Grand Paris Habitat. « Bien sûr, l’utilisation au quotidien d’une telle construction est particulière et il est nécessaire d’accompagner et de former les locataires pour les aider à mieux maîtriser leur logement. Mais les bénéfices en termes d’exploitation sont réels ».

La résidence CDC Habitat social Girard à Montreuil (93) est un projet exemplaire à plusieurs égards : labellisé Passivhaus, il est l’un des plus hauts immeubles à ossature bois d’Europe (R+6) et un véritable modèle de sobriété, notamment énergétique.

Une filière à structurer

Si l’enthousiasme est là, la construction bois demande néanmoins des moyens de production, des entreprises spécialisées et plus globalement des réseaux qui restent à consolider et développer pour espérer un développement rapide et pérenne, à grande échelle. C’est pour cette raison que Grand Paris Habitat a choisi d’adhérer en 2020 à Francîlbois, l’interprofession Forêt-Bois d’Île-de-France qui se mobilise depuis 2004 pour l’émergence d’une filière bois forte et structurée au niveau francilien.

« Pour grandir, la filière a besoin de l’engagement plein des bailleurs sociaux », reprend Alexandra Rossi. « Avec un parc de près de 350 000 logements et de nombreux projets à venir, en réhabilitation comme en construction, les adhérents de Grand Paris Habitat ont un vrai rôle à jouer pour l’émergence du bois comme une solution de construction pérenne ».

Le bois devait d’ailleurs être le sujet de la session de « GPH Académie » du 27 mars dernier, annulée en raison du confinement et de la crise sanitaire actuelle. Cette « académie » d’un nouveau genre, lancée début 2020, vise en effet à mutualiser les expertises et les expériences au sein de Grand Paris Habitat autour de thématiques qui mobilisent les adhérents.

« L’objectif de cette démarche est d’échanger des bonnes pratiques mais aussi de faire émerger des livrables et des plans d’actions opérationnels communs », explique Christophe Chanu, membre du directoire et directeur de la maîtrise d’ouvrage de Grand Paris Habitat. « Le bois s’est d’ailleurs très vite imposé comme un sujet d’intérêt pour l’ensemble des adhérents du GIE ».

Si la session a dû être reportée vu les circonstances actuelles, Grand Paris Habitat ne perd pas de vue ses objectifs, notamment la mise en place d’un cahier des charges « bois » partagé entre ses adhérents et le lancement de 10 à 20 projets – en construction neuve ou en réhabilitation – d’ici à 2025. Quant à la signature de la Charte Construction Bois Biosourcés par Francîlbois, elle n’est elle aussi que partie remise.

Plus d’information sur Francîlbois : http://www.francilbois.fr/

La mobilisation en faveur de l’émergence d’une filière bois en Île-de-France est au programme de la prochaine GPH Académie (ici, celle de janvier 2020). Cette « académie » d’un nouveau genre, lancée début 2020, vise en effet à mutualiser les expertises et les expériences au sein de Grand Paris Habitat autour de thématiques qui mobilisent les bailleurs adhérents.